L’apprentissage et l’accueil des émotions

Mon défi : semaine 6 sur 21

Si la parentalité positive est un sujet qui t’intéresse, tu as probablement du lire à plusieurs reprises que l’accueil des émotions était un pilier de l’éducation positive. A première vue, cette expression paraît assez abstraite. Parce qu’en réalité, ce qu’on veut apprendre en tant que parent, ce n’est pas des expressions pompeuses mais bel et bien comment, dans la vraie vie, on gère les émotions de nos enfants.

Dans cet article, je t’explique concrètement ce que l’accueil des émotions signifie et en quoi cela peut t’aider au quotidien.

Ce que j’aime beaucoup dans le sujet de l’accueil des émotions, c’est qu’il ne concerne pas uniquement les enfants… Combien il y a t-il de personnes autour de toi qui sont handicapées des sentiments, qui sont froides, qui ne disent pas ce qu’elles pensent, qui acceptent d’être touchées dans leur amour propre, qui pêtent les plombs comme ça sans raison apparente ou pire qui ne veulent plus être de ce monde ? Penses-tu que ces gens ont développé confiance et respect de soi ? Crois-tu qu’ils ont appris à se connaître et à entendre leurs propres sirènes d’alarme ?

Et bien voilà, l’acceptation et l’accueil des émotions, ça sert à éviter d’en arriver là… Combien de fois as-tu entendu lorsque tu étais petit des phrases comme : “allez, c’est rien, ce n’est qu’un petit bobo”, “n’aies pas peur”, “arrête de pleurer”, “je ne veux pas de colère”… Adele Faber et Elaine Mazlish nous expliquent dans leur livre Parents Epanouis, Enfants Epanouisqu’en démentant les perceptions d’un enfant, on affaiblie sa capacité à sentir le danger. En lui disant qu’il ne ressent pas ce qu’il ressent, on le dépouille de sa protection naturelle.

Tu peux aussi lire Pétage de plombs : et si on faisait un temps de pause ?

Mais pourquoi on fait ça ?

Pour le bien de sa famille

On sait bien que lorsque l’un de ses enfants est envahi par une tempête émotionnelle, l’effet sur l’harmonie familial peut être dévastateur. Les émotions “négatives” de notre enfant sont communicatives et peuvent affecter tout notre petit monde. Et quand toute la famille est irritable, ce n’est juste pas vivable ! Alors quoi de plus naturel que de ne pas avoir envie que son enfant exprime sa colère ou sa frustration ? On souhaite éviter le pire en désamorçant l’élément déclencheur.

exprimer les emotions

Pour son bien

Je te vois venir Parent Plus Qu’Imparfait ! Tu te dis « mais mince (t’as vu, je suis polie !), je sors ces phrases à mes enfants ! Je fais tout ce qu’il ne faut pas faire !”. Alors STOP, on arrête de se culpabiliser et on va de l’avant. Pourquoi on emploie ce type de phrases ? Et bien parce qu’on veut protéger nos enfants, on ne veut pas qu’ils souffrent. Pour être très précis, on refuse de les voir souffrir. Et aussi parce qu’on nous a toujours dit que cacher ses émotions, c’est être plus fort. Que seuls les faibles expriment leurs émotions. Ne dit-on pas d’ailleurs “pleurer comme une fillette » ?

Donc si je résume, les Parent Plus Qu’Imparfaits qui utilisent régulièrement ce genre de phrases le font par amour, par croyance et pour le bien-être de tous. Alors je vais encore te poser une question (oui je sais, je passe mon temps à te poser des questions !) : est-ce que faire les choses par amour, c’est mal ? Est-ce que dire des choses pour le bien de son enfant, c’est grave ? Est-ce que se comporter d’une certaine façon parce que c’est ce qu’on nous a appris, c’est terrible ? Bon d’accord, ça fait pas une question mais trois… La réponse est NON. Nous, Parents Plus Qu’Imparfaits, on fait de notre mieux donc pas la peine de se culpabiliser. C’est en fait génial de s’en rendre compte et de se dire qu’on n’est pas parfaits certes, mais qu’on est de super parents pour toutes les raisons que je viens d’évoquer et aussi parce qu’on a le désir de faire mieux.

En fait, ce qu’on aimerait, c’est apprendre à notre enfant à gérer ses émotions pour le bien-être de tous et pour sa vie future. Avis aux parents pressés qui cherchent une baguette magique : j’ai la grande tristesse de vous annoncer qu’elle n’existe pas et qu’il vous faudra faire preuve de patience. On continue quand même la lecture ?


Les trois clés pour apprendre à un enfant à mieux maîtriser ses émotions

1. Exprimer nos propres émotions pour se respecter

Nous vivons dans un monde de fous. Il faut être parfait : parfait au travail, parfait avec ses enfants, parfait avec son conjoint, parfait avec ses amis, parfait au sein de la société… Nous recevons au quotidien de nombreux messages hyper culpabilisants.

Il faut faire plus, mais pas trop. Il faut être plus zen, plus à l’écoute, plus joueur, plus présent, plus créatif, plus compréhensif, plus souriant, plus dans le contrôle… mais pas trop ! Donc si je comprends bien, on nous demande d’accueillir les émotions de nos enfants tout en baffouant les nôtres ? Non seulement, ce n’est pas possible et ça met une pression de dingue aux parents, mais en plus, ça va à l’encontre de ce que l’on souhaite enseigner à nos enfants !

Accepter ses émotions

Donc la première chose à faire si on veut être respecté des autres, c’est se respecter soi-même en acceptant ses émotions. Même si on ressent de la colère, de la peur, de la tristesse, de l’anxiété, du manque de courage, de la déception

“Exprimer ses émotions est un processus libérateur qui permet de se sentir intimement vivant.” Latifa Gallo, Se libérer des émotions négatives.

Exprimer ses émotions

Et surtout,  on doit les exprimer ! En revanche, et c’est là que ça se corse, on doit garder dans un coin de notre tête que les paroles ont un pouvoir énorme et qu’il est important de distinguer ce qui peut blesser notre enfant ou l’aider à avancer. Si on est vraiment furax, le Temps de Pause peut nous aider (j’en parlerai dans un prochain article).

surprise

J’aurai l’occasion de faire d’autres articles plus approfondis sur les émotions mais pour le moment, l’outil que tu dois retenir est le suivant : utiliser le JE responsable. Si tu veux créer une connexion avec l’autre, il faut faire attention à ne pas utiliser le TU accusateur, qui risque de le mettre dans une position défensive. Le JE permet d’exprimer ce que l’on ressent.

Bien souvent, la colère est l’émotion dominante. Mais si tu réfléchis bien, cette colère cache en réalité un vrai ressenti. Dans les trois exemples ci-dessous, l’émotion dominante en tant que parent est la colère. Mais au fond, cette colère dissimule autre chose : tu te sens blessé, triste, tu as peur. Alors, essayons d’exprimer nos ressentis.

  • Tu dis vraiment des bêtises => Je me sens vraiment blessé quand tu dis ça.
  • T’as encore déchiré mon livre, t’en fais exprès ou quoi ? => Je suis triste de voir que tu as déchiré mon livre.
  • Non mais ça va pas ? Qu’est-ce qu’il t’a pris de traverser la route tout seul ? => J’ai eu super peur, tu sais que pour traverser, il faut donner la main !

2. L’apprentissage des émotions

Exprimer ses propres émotions aide petit à petit l’enfant à comprendre les émotions. Dès l’âge de 2 ans, un enfant est tout à fait cabable d’apprendre les émotions car même si ce concept peut paraître abstrait, les émotions s’expriment au quotidien – surtout chez les petits.

D’autres outils peuvent faciliter l’apprentissage des émotions. Ces outils sont à utiliser en dehors des moments chauds, lorsque tout va bien à la maison.

La lecture

Il existe de nombreux livres à destination des enfants, leur permettant de poser des mots sur leurs ressentis et ainsi mieux gérer leurs émotions. Le blog Cabane à Idées a sélectionné 10 super livres sur les émotions. Par ici la liste.

la couleur des emotions

Le jeu

Rien de tel que jouer avec son enfant pour se connecter et lui enseigner des choses. Le jeu de rôle est parfait pour ça. Avec Poussinou, on adore en faire. Il me demande d’imiter un chat en colère, un chien triste, un canard joyeux ou un mouton qui a peur. Je te laisse imaginer comme j’ai l’air fine dans ce moments-là ! Mais on rigole vraiment. Ensuite, on inverse les rôles. Succès du jeu garanti !
On peut aussi faire deviner des émotions en les jouant, comme au théâtre. Ou tout simplement faire un tour de table au moment du dîner pour savoir ce que chacun ressent.

Des objets

Un objet peut permettre d’identifier plus concrètement des émotions. Ce peut être des petites figurines en tissu à confectionner, des cartes colorées, une roue des émotions (le blog L’Ecole des Juliettes propose une roue à télécharger inspirée du super livre La couleur des émotions), des pastilles à accrocher sur un tableau…

Un film

Ou plutôt, un dessin-animé : Vice-Versa de Disney Pixar. Pour voir la bande-annonce, c’est par là. L’histoire : il s’agit d’une petite fille, Riley qui comme nous tous est guidée par ses émotions – la Joie, la Peur, la Colère, le Dégoût, et la Tristesse. Ces émotions vivent au Quartier Général, le centre de contrôle de l’esprit de Riley, et l’aident et la conseillent dans sa vie quotidienne. Mais le chaos s’empare bientôt du Quartier Général…

 

3. L’accueil des émotions

L’immaturité du cerveau

La partie supérieure du cerveau, celle qui contrôle les émotions, est immature chez l’enfant. Donc tant que le cerveau n’a pas atteint sa pleine maturité neurologique, les processus de gestion des émotions et des affects ne sont pas totalement fonctionnels. Cela explique pourquoi l’enfant a des difficultés pour contrôler, maîtriser ses réactions émotionnelles et affectives. L’accueil des émotions est donc d’autant plus important pour nos enfants car ils subissent de véritables tsunamis internes.

L’accueil des émotions : comment faire concrètement ?
L’accueil des émotions, c’est le fait de savoir accepter les émotions en permettant à l’enfant de libérer ses tentions
. On peut lui proposer de taper dans un coussin, crier dans sa chambre, donner des coups de poing dans un punching-ball, déchirer du papier, taper du pied…

C’est aussi essayer de comprendre ce qui se passe dans son corps et dans sa tête et se connecter à lui. Véronique Maciejak nous explique dans son livre 1, 2, 3, je me mets à l’éducation positive que la clé la plus puissante pour accueillir une émotion est l’écoute empathique.
Pour pratiquer l’écoute empathique, il faut :

  • Etre disponible physiquement et mentalement en se mettant à sa hauteur. Donc si tu es pressé ou crevé, remets ce moment à plus tard.
  • Etre sincèrement à son écoute, sans le juger ni le comparer. L’enfant doit pouvoir vider son sac sans crainte.
  • Reformuler certains de ces propos pour l’aider à éclaircir une situation si besoin.
  • Ne pas avoir peur des silences car ils aident l’enfant à réfléchir.
  • Guider l’enfant en lui posant des questions afin qu’il trouve seul une solution.
  • Eviter de proposer une solution toute faite. L’enfant doit comprendre qu’il a la capacité de résoudre son problème.


Bienveillance ET fermeté

Accueillir les émotions OUI, accepter toutes les réactions, NON.

“Toutes les émotions son légitimes, les comportements ne sont pas tous acceptables.”
Haim Ginott

En effet, je peux comprendre que Poussinou soit en colère quand on part du parc en revanche, ce n’est pas acceptable qu’il me tape. Donc dans ce type de situations, on souffle un bon coup, on pose son enfant au sol et on se met à sa hauteur puis on lui dit “Il va bientôt faire nuit, nous devons rentrer. Je comprends que tu sois en colère. Tu t’amusais beaucoup et tu aurais voulu rester, c’est bien ça ? Poussinou tu le sais, les mains sont faites pour caresser ou chatouiller. Que pourrait-on faire pour s’amuser aussi sur le trajet du retour ? Oui, on peut faire la course !

Les règles et les limites, tout comme la bienveillance, sont nécessaires à la construction d’un enfant et ne sont en rien incompatibles avec l’accueil des émotions. Elles sont sécurisantes et permettent de développer des compétences sociales et civiques.

Accueil des émotions


Alors, est-ce que ça marche l’accueil des émotions ?

Je ne vais pas te mentir, c’est un travail de longue haleine. Mais les résultats commencent à se sentir.

  1. J’ai fait un énorme travail sur le fait d’exprimer mes propres émotions calmement. Je peux dire que j’y arrive à 95% à présent alors que ce n’était absolument pas le cas auparavant ! Soit je les refoulais, soit je les exprimais violemment.
  2. Poussinou commence à connaître les principales émotions. L’autre jour, quand je lui ai demandé quelle émotion il ressentait à ce moment précis, il m’a dit en soupirant et souriant qu’il “avait de la sérénité”. J’étais aux anges !
  3. En ce qui concerne l’accueil des émotions, je les accepte désormais et réussis quasi systématiquement à les accueillir. Evidemment, le fait d’accueillir la colère chez un tout petit ne permet pas toujours l’arrêt d’un comportement inapproprié mais ça aide très souvent. Lorsqu’un enfant est capable d’exprimer des solutions, c’est juste génial car son attention se porte ainsi sur la recherche de solutions plutôt que sur la colère. J’en constate de plus en plus les effets positifs sur Poussinou et sur nous, Parents Plus Qu’Imparfaits !

Et toi, où en es-tu avec l’accueil des émotions ? N’hésite pas à commenter afin de partager tes idées pour enseigner de façon ludique les émotions à ton enfant !

Musique : Jamie Rumley


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